SALUT sylvie
te voici complètement protégée de l'enfer de ce monde
un jour, c'est parmi nous, c'est vers les laissés pour comptes infâmes, que tu es venue entamer ta fuite
de quoi avons nous parlé qui soit à dire ; j'ai oublié et de ce qu'il me reste, rien n'est pas a partager
pouvions nous poser des mots sur le trop plein fait d'écoeurements, de violences, d'abandons ; un vécu lourd, trop lourd
devions nous l'expliquer cet abandon du monde, devions nous à travers lui trouver raison à se laisser partir
se laisser glisser dans notre abandon et nous y appartenir, nous y oublier et chercher dans toujours plus … plus de vin, plus de cachets, plus de folie, plus de colère, plus de noirceur, plus de mélancolie, plus d'ironie … jusqu'à en oublier l'étincelle
aller au bout
courir après la déchéance, devenir un coin du miroir, devenir, être et disparaître
nous étions face à face, en face et côte à côte
plus tu t'enfonçais, plus je résistais
on se guettait et lorsque nous pensions pouvoir nous supporter, nous offrir le silence, un temps de paix, on partageait ce banc, lui aussi disparu au musée d'art moderne
on ne regardait rien
tes yeux enivrés, mes yeux trop éveillés nous rendaient aveugles
on était en nous, on avait ce lien d'une vie avant, cette compréhension muette
et cette incompréhension ; tu cherchais encore et toujours, là ; là au plus profond du marécage
là dans la noirceur des hommes, dans les plus abîmés des hommes, dans le chaos, dans la raffut, là … tu cherchais ce que l'on nomme l'amour
comment peut-on chercher l'amour lorsque sa famille est là, là malgré tout et lorsqu'elle t'inonde d'amour
comment peut-on y croire de cicatrice en cicatrice
je t'ai souvent répondu de mon regard fixe et aujourd'hui encore je n'ai que ça à t'offrir ; car c'est moi
avec … avec cette idée que maintenant, te voici de la terre, que de ton corps s'envolera une graine légère et que là-bas, au loin, ailleurs, germera une fleur
je reste encore un peu sur la terre de l'enfer
salut sylvie
à un de ces jours